lundi 23 février 2009

Darwin toujours incompris

Vous connaissez probablement le principe de la sélection naturelle auquel nous devons notre existence. Mais avez vous réellement assimilé les implications de la découverte de Darwin ? Pour le savoir, répondez à cette question, issue d'une enquête menée en 2005 à la Sorbonne :

« A l'état sauvage, certains éléphanteaux sont porteurs d'un gène qui prévient la formation des défenses. Les scientifiques ont constaté récemment que de plus en plus d'éléphanteaux naissaient porteurs de ce gène. Comment expliquez-vous cette situation ? »

Prenez le temps de réfléchir, puis notez votre réponse sur un bout de papier. Très bien, maintenant, voici une petite analyse des réponses les plus fréquentes.
Réponse 1:
Les défenses des éléphants ne leur servent plus. Devenues inutiles, elles tendent à disparaître.
Réponse 2:
Les chasseurs tuent les éléphants pour leurs défenses d'ivoire. Dès lors, la disparition de ces défenses constitue une adaptation de l'espèce « éléphant » à l'environnement : les éléphanteaux mutent pour se protéger de la convoitise des chasseurs.
Si votre réponse ressemble à la 1) ou la 2) (comme la majorité des interviewés, qui indiquaient pourtant exprimer les idées de Darwin !!!), vous avez tout faux. Vous avez compris Lamarck mais pas Darwin (ou plutôt, ce que l'on a appris depuis Darwin, puisque ce dernier ne s'est jamais vraiment débarrassé des idées de Lamarck). 
En effet, du temps de Lamarck, on pensait par exemple (à tort) que les girafes avaient un long cou parce qu'une force vitale leur avait allongé pour que leur nourriture située sur la cime des arbres leur soit plus accessible. Cette adaptation acquise devenait (selon les croyances de l'époque) ensuite innée.
 
Quant à la bonne réponse à notre devinette, la voici :
Réponse 3:
Les éléphants qui sont porteurs du gène seront moins chassés que les autres et auront donc des probabilités de chances de se reproduire plus grandes que les autres. Ce n'est donc pas tant la population des éléphanteaux qui se modifie que celle des géniteurs.
Ce qui est fondamentalement différent. En effet, il faut bien comprendre que les mutations génétiques lors de la reproduction (évoquées dans les réponses 1) et 2) se produisent de façon totalement aléatoire : elles ne peuvent en aucun cas être induites "volontairement" pour conduire à la suppression d'un organe inutile ! Les éléphanteaux ne peuvent donc pas muter "pour se débarrasser de leurs défenses".

Ce qui nous conduit à répondre 1) ou 2) plus spontanément que 3), c'est notre  besoin de trouver une cause et de donner un sens à tout (je reviendrai la dessus dans un prochain billet). Or, depuis Darwin, nous savons justement qu'il n'y a pas de mutations "orientées", "guidées" dans un objectif précis, et que c'est cet aspect purement aléatoire, dénué de toute intelligence, qui est à l'origine de l'incroyable diversité du  vivant.

Ceux qui n'arrivent pas à l'admettre ne sont pas créationnistes, mais finalistes, c'est-à-dire disposés à croire que les mutations génétiques ne se produisent pas aléatoirement, mais tendent vers certaines fins – adaptatives en l'occurrence, ce qui est faux, rappelons le.


Selon un sondage de juillet 2005 (Institut de recherche Pew), 
  • 26% d'Américains seulement se déclarent convaincus par les thèses évolutionnistes. 
  • 38% souhaitent que le créationnisme soit enseigné à la place de Darwin dans les écoles
Pour nous rassurer, nous pensons qu'en Europe, il y a probablement plus d'évolutionnistes, mais il est légitime de se demander combien d'entre eux ont répondu correctement !


Faites le test dans votre entourage, vous serez surpris...

source imep/cnrs

2 comments:

Anonyme a dit…

Interessant!
Mais comment expliquer qu'on entende si souvent que d'après des études serieuses, notre petit orteil serait voué à disparaitre, son usage étant devenu nul.
Comment pourrait on justifier ça dans le paradigme darwinien?

zetein-sciences a dit…

Bonjour et merci pour votre commentaire.
Je n'ai pas connaissance d'études sérieuses prédisant la disparition du petit orteil chez l'homme. Pouvez-vous me les communiquer ?

Je ne peux donc vous répondre pour l'instant de façon pertinente.

En revanche, on peut expliquer par exemple que les dents de sagesse soient moins présentes de nos jours.

En effet, pour simplifier, avoir des dents de sagesse était important jadis, afin de pouvoir s'alimenter correctement. La pression selective a donc entrainé une présence importante du gène "dent de sagesse" dans la population. De nos jours, l'alimentation étant différente, avoir des dents de sagesse n'est plus un critère de survie. Il se produit donc un réequilibrage, une évolution neutre, et les porteurs du gène "pas de dents de sagesse" sont plus nombreux qu'avant puisqu'ils peuvent se reproduire comme les autres.

Je ferai un nouveau billet avec d'autres examples de ce type.

Cordialement, zetein-sciences.